Le Guelmois comme on le parlait là-bas... ( A - H)
Publié le 12 Mars 2011
Evocation
La langue de
Guelma exprimait dans des couleurs particulières et des images parfois surprenantes, tout ce que nous avions de joyeux, de moqueur, de vivant d’imagé. Elle reflétait notre bonheur simple de vivre ensemble dans la diversité de nos origines cosmopolites, française, italienne, maltaise, juive, espagnole. Elle était formée d’une mosaïque de mots et
d’expressions qui
traduisaient l’originalité de la communauté guelmoise.
Mais, à l’évidence, la langue arabe imprégna notre façon de parler bien plus profondément que nous ne voulions nous l’avouer. Beaucoup d’expressions
arabes ou
de mots en usage à Guelma étaient employés ailleurs, en Algérie. Bien évidemment ! Si imaginatifs qu’ils aient été, les guelmois n’ont jamais inventé un vocabulaire propre mais
l’ont plutôt importé et accommodé à leur façon.
Il manquera àce vocabulaire deux ingrédients essentiels : le ton de la voix et les gestes des mains. Nul doute que vos souvenirs les feront
renaitre, aussi chaleureux et expressifs que sur la place Saint Augustin ou à la terrasse des cafés de l’Avenue Sadi-Carnot.
Guy
Bezzina
A
Al kif
Ex :« Ces gâteaux de Bonnet, ils sont
Al kif ! Y a pas mieux en
France ! »
Allah Rhaleb’- C’est
ce qu’on disait quand les dés étaient jetés… Quelque chose comme « A la grâce de
Dieu ! - Ex : « J’ai labouré, j’ai mis du phosphate, j’ai semé, j’ai hersé, j’ai taillé, j’ai sulfaté… maintenant , " Allah rhaleb!"
Aouah : Interjection exprimant l’étonnement, la surprise,
l’incrédulité…On pourrait la traduire par: « Comme c’est
curieux ? ».Ex : « Ti as vu que la neige elle est tombée sur la Mahouna ? Aouah , j’me disais aussi que je commençais à avoir des
engelures.. »
Aoudj’ac (faire l’aoudjac) : guetter. Dans tous leurs mauvais coups, les petits
guelmois prenaient la précaution de poster un guetteur pour surveiller
l’environnement et avertir du danger - Ex :« Bon, nous on monte sur le
figuier et toi tu fais l’aoudjac pour voir si vient pas quelqu’un »
Atchidente..(De l’italien accidente)
C’est une autre version de « la purée de nous autres
Ex : « Le car de Bône, il a
démarré sous mon nez ! L’achidente ! »
Attaque (d’) :
Sans doute s’agissait-il à l’origine de se déclarer en
forme, prêt à l’attaque… A Guelma, cela
était synonyme d’excellent, de formidable.
Ex : « Comment tu vas ce matin? » « Je suis d’attaque »
Azrine :
En Arabe, c’était le diable. Allez chez Azrine, c’est aller au diable
Ex : « Tu veux pas m’écouter mon fils,
alors va t’en chez Azrine ! »
B
Babbas- Les curés… Expression sans doute malicieuse mais sans méchanceté
Ex : « Il est rentré au séminaire…
un babbas de plus dans la famille »
Bab el
Souk : La porte du marché aux bestiaux sur la route de la
Mahouna…C’était un endroit éloigné
Ex : « Il faisait une tête comme
d’ici au Bab el souk »
Badjok :
Fou, dérangé (voir boudjadi)
Ex : « Il a vendu son bourricot
pour une poignée de dattes… il est badjok »
Bagali : en arabe, c’est du
mortier grossier… Dans le langage des ménagères de Guelma, ce terme
désignait les barbouillages des pieds
sales sur un sol fraichement lavé
Ex : « Allez, va de là avec tes
godillots tu me fais du bagali sur mon
parterre »
Barbeau – Un barbeau est un souteneur. « Faire le barbeau » c’était faire le malin, l’arrogant, le
provocateur
Ex : « Entention ! Avec moi
tu fais pas le barbeau ou je t’en mets une… »
Bien bien :
superlatif pour désigner une action bien menée..
Ex : «Il a insulté ma mère, alors je lui
ai monté l’aubergine, bien bien »
Blabi :
Friandises faites de pois-chiches grillés parfois enrobés de sucre
Ex « La vie est ainsi faite ;
aujourd’hui des blabis, demain des cacahuètes »
Blèche : gratuit
Ex : «
Allez, madame, tu me prends trois kilos et je te
donne le reste, blèche, parce que c’est
toi.. »
« Bons Marchés »
Quartier de Guelma situé au dessus du Monument aux morts et
de l’Ecole d’Alembert sur la route du cimetière .Les « Bons Marchés »
étaient ce qu’on appellerait
aujourd’hui un lotissement formé de
petites villas qui se ressemblaient toutes et qui ont été construites… à bon marché.
Ex : « C’est facile pour lui
d’arriver à l’heure à l’école d’Alembert, il habite aux Bons Marchés… »
Bon numéro – Bonne
pièce : Les guelmois très sourcilleux sur l’honneur des
filles
manquaient souvent de charité pour qualifier une fille légère. C’était une
bonne pièce ou un bon numéro.
Mais à Guelma, toutes les filles étaient sérieuses et ce qualificatif ne
s’employait que pour des étrangères…
Ex :
« Ti as vu celle là, avant elle
était avec Chose, maintenant elle marche avec Machin ! C’est une bonne
pièce ! »
Bou :
Ce terme arabe constituait une espèce de superlatif et
marquait la démesure. Un bou -t’nach »était un homme qui en
valait onze mais un « bou-
terma » désignait un gros derrière. Nous avions ainsi une collection
de spécimens de « bou -chlerem » les moustachus, de « bou-kercha » les
ventripotents, de « bou -touil » les grands maigres et la liste n’est pas exhaustive !
Bouchon (avoir le) : Etre constipé. Les
figues de barbarie étaient la cause majeure de cette affection gastrique
embarrassante pour le patient mais qui suscitait toujours les moqueries
Ex : « Il a trouvé les figues de
barbarie, mange que je te mange, total maintenant, il a le bouchon »
Boudjadi : autrement dit « chaouia »,
« tchouch », « jobasse », « D’jahane »,
« badjok », (en maltais Tchaola) … un quotient intellectuel tout petit, tout petit !
Ex : « Tu trouverais pas l’eau dans
la mer, quel boudjadi tu
fais ! »
Bouffa : une cuite à
l’anisette ou au Guébard, peu importait pourvu qu’on eût
l’ivresse
Ex : »Pour le conseil de
révision, on a fait le tour des
cafés de
Guelma et on s’est pris une
bouffa, j’te dis pas ! »
Boumarlout :
Au sens propre, mélange d’orge et d’avoine mais
se disait de tous les mélange
Ex : « C’est un boumarlout :
son père il est espagnol et sa mère elle est de France. »
Bourricot : Les bourricots de chez nous étaient solides et
travailleurs mais ils n’avaient pas inventé l’eau tiède… Nous étions quelques
bourricots à l’Ecole d’Alembert promis à la seule université de l’Oued S’Kroun
mais la vie fait parfois des miracles…
Ex« Ne sors pas sans ton casque, tu va attraper un coup de soleil,
bourricot ! »
Bouzoullettes
C’était les petits seins des jeunes
filles qui se trémoussaient quand elles dansaient la samba, le
tcha-tcha-tcha ou la « danse
atomique
Ex : « Je l’ai vue à la Fontaine
Chaude, purée comme elle était belle, elle avait des bouzoulettes qui jappaient
à la lune »
C
Cab Cab :
galoches de bois portées par les petites mouquères
Ex « Dépêche toi, j’entends les
cab-cab des petites mouquères, tu vas arriver en retard à l’école »
Caca de pigeon : pâtisserie orientale appelée aussi halwa
Ex : « Va, mon fils, chez le mozabite. Tu lui demandes un quart de
caca de pigeon mais qu’il te la choisit bien fraiche ! »
Cacahuètes
( syn. : claouis): se disait des bijoux de famille.
Casser les cacahuètes, c’était se montrer importun
Ex : «Toute la journée il m’a cassé le
cacahuètes avec son chagrin d’amour… »
Cagade :
plus généralement, une déconfiture, un
désastre, une catastrophe.
Ex : « Il a essayé de me
réparer la machine, il m’a fait une
cagade »
Caldi : Petits pâtés maltais (appelés pestezza à Malte), faits d’un mélange de broutche
et de petits pois, enveloppés
dans une pâte feuilletée et cuits au four. On les trouvait, tenus au chaud dans
un four en tôle noire et prêts à
consommer, devant un café situé en face du marché de Bône
Ex : « Les caldi ?, c’est
comme le couscous, il n’ y a que ma mère qui savait les faire… »
Carmousses : petites baies noires qui tombaient des micocouliers comme
ceux de la route de Sédrata, avant la pépinière. Les carmousses avaient la
taille d’un gros grain de poivre. On grignotait une pulpe minuscule sucrée et le noyau servait de projectile pour les
sarbacanes.
Ex »Elle m’a dit que tu lui faisais de
l’œil… »« Mais, j’lui fais pas
de l’œil .. J’ai reçu une carmousse ! »
Challah - Les guelmois
possédaient parfois le génie de transformer une bénédiction en
malédiction… Quand on dit « inch’Allah » on
demande à Dieu d’exaucer un vœu. Mais quand les guelmois disaient «
Challah que… » c’était immanquablement pour souhaiter un malheur.
Ex « Ti as vu que le chien il a mangé
toutes les saucisses ? » « Challah qui crève la gueule
ouverte ! »
Cheklella :
Une faiseuse d’histoires ou plus
précisément une emmerdeuse
Ex : « Avec celle là, tu fais pas
le barbeau, c’est une cheklella, elle est pas facile à traire »
Chèrh-
C’était une interjection spontanée qui suivait généralement un appel à la
prudence qui n’était pas suivi. Synonyme
de « Bien fait, je te l’avais dit »
Ex : « Touche pas les brochettes,
tu vas te brûler ! » « Aïe ! » « Cherh’… Le Bon
Dieu y t’a puni ! »
Ch’gonfiat ( étym. : de se
gonfler ?)Prétentieux, fanfaron…
Ex : « Tout ce qu’il
raconte,
c’est tout du t’ménik… c’est rien qu’un ch’gonfiat ! »
Chiqueur : Quelqu’un qui fait du chiqué et des manières qui le rendent
ridicule.
Ex : « Ce plein de vent, il a tout
dans la cravate… C’est un chiqueur ! »
Chien mort –Les avares, les égoïstes, ceux qui refusaient de rendre
service étaient des chiens morts.
Ex : « A la quête du curé, il a
donné seulement dix sous…» « Quel chien mort… »
Chiffon de parterre – le sol c’était le
« parterre » et le «
chiffon de parterre » c’était la serpillière
Ex « Essuie toi les
pieds sur le
chiffon de parterre,»
Chita - Faire la chita : passer la brosse à reluire. Il convenait à Guelma de ne pas être trop
empressé surtout auprès des personnes influentes. Les obséquieux étaient vite
tournés en dérision.
Ex : « I croyent que parce qu’i
font la chita à la maitresse, elle va leur enlever la colle… »
Chitane – En maltais, c’est le diable… Tous les enfants turbulents étaient traités de
chitane.
Ex : » Ce chitane, il a fait rien
que parler à la messe… »
Choumarelle :
La Choumarelle était un quartier un peu spécial de Bône.
Ses habitants n’avaient pas la réputation d’une extrême distinction ni d’un
langage châtié. Traiter quelqu’un
de« choumarelle » soulignait son laisser aller.
Ex : « Regarde un peu comment ti
es habillé… Choumarelle !»
Chose – Machin. La
mémoire guelmoise était parfois infidèle mais les guelmois usaient volontiers
de périphrases pour pallier l’amnésie d’un nom. C’était « Machin » ou
« Chose » quand ce n’était pas « Machin-chose ».
Ex : « Tu viens
seul ? »- « Non je viens avec machin, le type de l’école
d’agriculture que son beau père y s’est mis de moitié avec chose pour vendre
les melons »
Cinq-et-trois-huit.
Faire cinq et trois huit, c’était se mettre dans la poche
ce qui ne nous appartenait pas.
Ex :Pendant que l’autre y tapait
l’anisette, il lui a fait cinq et trois huit avec la monnaie…
Colon : Les colons de Guelma étaient des agriculteurs. Il y en
avait quelques riches et beaucoup de modestes. Les premiers colons de Guelma
n’acquirent leurs terres qu’au prix d’un travail acharné, de privations.
Beaucoup moururent d’épidémies ou de désespoir… La calomnie et la haine n’avaient
pas encore souillé ce mot si noble.
Ex : « Que fait ton
père ? Il est colon, M’dame »
Couffin –
(Les arabes disaient : gouffa). Les ménagères de Guelma faisaient leur
marché avec un panier en fibres tressées (palmier?) muni d’anses. Il se vendait généralement chez les
tunisiens ou les mozabites. Mais le couffin servait aussi à transporter les repas froids des
pique-niques . C’est ainsi que le lundi de Pâques a été baptisé la
« Saint-Couffin », les guelmois
allant déjeuner sur l’herbe à la
campagne ou à Hammam Meskoutine, le
couffin rempli de victuailles.
Ex : « Ti as vu comme elle a
grossi ? » « Oui, je crois qu’elle a un polichinelle dans le
couffin ! »
Cours Bonnet – Le cours Bonnet, appelé administrativement Avenue Sadi Carnot, était les Champs Elysées
de Guelma avec son large trottoir sur
lequel s’ouvraient de nombreux cafés et commerces dont la célèbre et excellente
pâtisserie Bonnet. Ce cours servait de
promenade du soir des jeunes et moins jeunes. En été, on faisait le cours Bonnet. Des groupes
montaient et descendaient se croisant dans une joyeuse ambianc
Ex : « Ti as pas vu Toto, Riri et
Luluce ? » « Si sont pas au café Walter, i sont à la
Tricolore
Claouis Signe distinctif
masculin pluriel… Pourtant quand il s’agissait de « ceux »
des moutons, on les appelait des « rognons blancs » et on les faisait
griller sur la braise.
Ex : « Oh Bourouine ; tu me
fais
griller douze brochettes, douze merguez et deux bons claouis de mouton »
Créponnet
– Les français de France appellent ça du sorbet ; à Guelma , c’est du créponnet.
En
France, on en fait à tous les
parfums ; à Guelma , c’était juste au citron.
En
France, si on le mange trop vite on se glace l’estomac ; à Guelma aussi.
Ex -« Oh Tchouch ‘ tu m’as fait tomber
le créponnet sur le parterre! »
Croquante : Nougat aux amandes qui constituait
l’essentiel des pièces montées
surmontées d’un petit sujet représentant un petit communiant, une petite
communiante ou un couple de jeunes mariés.
Ex : « Comme c’était la guerre, ma mère elle a dû
acheter au marché noir, le sucre et les amandes pour faire la croquante de la
pièce montée de ma Communion. »
D
Dache.
Dache est un personnage de roman de Paul
de Sénant « Dache le perruquier des Zouaves ». A Guelma, quand on
nous envoyait chez Dache, c’est qu’on ne
nous voulait nulle par ailleurs.
Ex : « J’peux plus le voir en
peinture… Qu’il aille chez Dache »
Datte
(passer une) Geste grossier, réalisé
dans la confusion de la cours de récréation de l’Ecole d’Alembert et dont
l’auteur était rarement identifié…
Ex : « M’dame, i m’a passé une
datte » « C’est pas moi, M’dame, j’avais les mains dans les
poches ! »
Deb: C’était le bourricot et comme nos bourricots n’étaient pas
assez stupides pour servir de références à notre bêtise, on nous
qualifiait parfois de « Deb ben deb » « bourricot fils de bourricot »… Une
quintessence de la bêtise !
Ex : « Comment tu travailles, mon
fils ? Deb ben deb ! » « Oui, papa ! »
Dégager :… Etre prié de s’éloigner…
Ex « Ti as eu ta part ? Alors,
dégage… »
Donnade : Une rixe, une bagarre générale
Ex ; » Quand ceux des Bons Marchés i z’ont rencontré ceux de
la ville, ç’a été la donnade »
Donner : battre, infliger une correction…
« Il t’a insulté tes meilleurs ? Allez, donne lui sa mère
… »
Dorba-
c’était une correction, une tannée, mais à la mode guelmoise… Pas de martinet
mais le bâton ou la ceinture sur les fesses et sur les cuisses :
Ex « Attends… Quand ton père y rentre,
j’lui dis qui te donne une bonne dorba… »
Dubénisse – En fait, c’était « Dieu
bénisse » mais à Guelma pour partager une bonne nouvelle on
disait « Dubenisse »
Ex :
- Mon fils il a pris trois kilos, i dit
« Manman » et i commence à marcher
- Dubenisse
- …mais , i fait toujours pipi au lit
- L’atchidente !»
E
Em’
chi… Interjection qui invitait à prendre congé rapidement et
sans barguigner…Plus guelmoisement, c’était envoyer ballader quelqu’un qui
n’avait rien à faire dans les parages. Pourrait se traduire par « va voir là-bas si j’y suis..»
Ex : « Ne me cache pas le soleil…Ayha, Em’chi ! »
F
Faire – devenir, avoir l’intention d’exercer un
métier
Ex : « Quand je serai grand, je
vais faire garde champêtre et mon frère, il va faire colon comme mon
père »
Falso- C’est
le type même de l’hypocrite du faux jeton, faux cul, faux frère spécialiste des faux semblants et
des faux-fuyants… Quelqu’un qui a tout faux quoi !
Ex :«Ti as vu ce falso, par devant
i te passe la main dans le dos et par
derrière, i te crache à la figure »
Farfate : Prétentieux qui
n’a
pas les moyens de ses ambitions ou qui
veut poéter plus haut que son QI…
Ex : « Ce farfate, Il a marié sa fille en grande pompe et total il a servi
de la limonade à la place
du champagne… »
Fartasse. Les
coiffeurs de Guelma coupaient les cheveux et rasaient les barbes, même le
dimanche matin… Ils avaient des rasoirs coupe-choux qui nous faisaient peur
mais nos coiffeurs les maniaient avec
une dextérité surprenante. Parfois nous ramenions des poux de l’école et quand
la lotion « Marie-Rose » ne faisait pas d’effet, nos mères nous
faisaient raser le crâne… Nous devenions « fartasses » comme les
petits mozabites qui cultivaient leur fartasserie toute l’année. L’âge plus
surement que les poux nous rend désormais fartasses sans besoin de rasoirs.
Ex : « Qui c’est le garde
champêtre ? …le petit bouboule avec
une grosse tignasse? » « Non c’est le grand sloughi
fartasse… »
Fatche ( de l’italien faccia : visage) La
fatche, c’est la figure mais sous son plus mauvais profil. Le plus souvent
suivi de compléments qui n’étaient pas des compliments.
Ex : « Avec sa fatche de merlan
frit, il embrouille tout le monde »
Fékra; manières
Figure
– La figure , c’était le visage mais
aussi l’honneur… Quelqu’un « qui
n’avait pas de figure », n’avait aucun sens de l’honneur ; avoir
honte c’était « perdre la
figure » quand ce n’était pas
« faire tomber la figure ». Mais on atteignait le comble du
mépris quand on jugeait que quelqu’un avait «
une figure de cul ».
Ex : « Ti es fou ou quoi ? ti
es venu à l’église avec cette chemise déchirée… Tu m’as fait tomber la
figure ! »
Fils, fille. Les guelmoises étaient naturellement sentimentales et
tendres. Avec un naturel que d’autres nous envient, elles appelaient« Mon fils » ou
« Ma
fille » des personnes avec qui elles n’avaient aucune parenté mais à
qui elles voulaient témoigner leur amitié… Cette habitude ne s’est pas perdue avec l’exil.
Ex : « Ma fille, si ti étais ma
fille, je t’aurais donné une gifle ! »»
Fissa… C’est
plus vite que vite, c’est
immédiatement, incessamment, sous peu et
peut-être même avant
Ex : « L’école va fermer… fissa,
fissa ! »
Fougasse aux anchois- La « fougasse aux anchois » était vendue
dans la rue par des marchands
qui la transportaient sur la tête dans une grande tôle en criant « la fougasse aux anchois… toute chaude ! ».
Il s’agissait d’une pâte de pain assez épaisse,
maigrement garnie de tomates et d’olives. On appelait aussi fougasse,
la pizza dont les ménagères faisaient gonfler la pâte au soleil avant de
la garnir généreusement de tomates, d’ail, d’anchois, de l’origan et de l’envoyer cuire dans le four du boulanger.
Ex : « Dis à ta mère que c’est dix
sous pour faire cuire une fougasse dans
mon four… »
Frangaoui (voir patos). Les français de France nous
prenaient souvent pour des chaouias ; ils s’étonnaient même qu’on soit blancs, qu’on parle français
et qu’on ne vive pas dans des gourbis… Ils se rendaient rapidement compte de
notre sens de la dérision et de notre susceptibilité quand ils nous prenaient
pour ce qu’on n’était pas. Plus tard, ils nous ont baptisés «
Pieds-noirs », alors on les a appelés « culs blancs »…
Ex : « Il fait le malin, il veut
parler comme un frangaoui »
Frèt’ :
« C’est tout… » Une manière comme une autre de mettre un
point final à tout
Ex « Tu vas lui rendre sa kessera et tu
vas lui dire que nous, on mange pas de ce pain là… frèt’ »
Frigolos.
Après l’Indépendance, les
« frigolos »rapatriés sont
devenus des sucettes glacées ou des esquimaux
Ex « A l’entracte, j’lui ai offert un
frigolo… Elle a fondu ! »
F’taïrs : Ces beignets étaient la spécialité des tunisiens qui, assis
en tailleur, les faisaient cuire dans une grande marmite d’huile bouillante.
Ex : « Les âmes des pécheurs iront
brûler en enfer » « …
comme des f’taïrs, M’sieur l’abbé ? »
G
Gamate : dégonflé
Ex : » J’l’ai pris pour faire
la
course jusqu’à Millisimo, mais , le gamate ,i s’est dégonflé,»
Gat’s : Les mâles de Guelma étaient toujours fiers de leurs
« attributs ». Ils évoquaient leur « gat’s » à temps et à contre-temps : par
interjection, pour marquer leur indignation : « mon gat’s !» ou dans des circonstances où l’organe
avait peu à voir ; comme synonyme
de « s’évertuer » ou pour exprimer un très grand effort
dans l’expression : « se casser le
cat’s ».
Ex : « … Je me suis cassé le gat’s
pour monter à vélo jusqu’au col du Fédjouze »… pour en arriver là, l’effort dut être violent !
Gavatcho ; débraillé
Ex : Mets ta chemise et remonte ton pantalon,
ti es habillé comme un gavatcho »
Gaz
(être de gaz) C’est être fin saoul
Ex : « I trouvait plus le trou de
la serrure, il était complètement de gaz »
Gazééna.
Les tireuses de bonne aventure parcouraient les rues de Guelma en chantant « Ena Gazeena ! » - «
Je tire la bonne aventure ». Elles tiraient toujours des lignes de la main, des prévisions généreuses
qui comblaient toutes les vieilles filles et les faisaient rêver…
Ex « Je crois qui y en a un, il a le
béguin de moi… » « Ti es folle ? C’est la gazéna qui te l’a dit ? »
Gazouz : limonade,
orangeade, sodas…
Ex : « Je bois plus de gazouz…Ca me
donne de l’aérophagie ! Allez, sers moi un Picon à l’eau de Selz»
Gigasse. C’est
une fille qui ne peut que vous regarder de haut même quand elle a de jolis bas.
Ex : « J’ai pas pu voir ces
yeux à cette gigasse, j’suis trop p’tit »
Gobbe –(
de l’italien gobbo- bossu) malédiction
Ex“ Qui te vient le gobe et les yeux blancs” autrement
dit « Que tu deviennes bossu
et aveugle »
Gougoutse –
simplet, béta
Ex : « ce gougoutse, il est pas
capable de trouver de l’eau dans la mer »
Guébariste. Le « Guébar » était une marque de
vin courant dans la région de Bône Guelma. La consommation de vin aux repas
était assez habituelle mais les guelmois n’en buvaient pas en dehors des repas…
sauf les « guébaristes » qui faisaient la journée continue aux comptoirs des nombreux cafés
Ex : « Ne le crois
pas ce
tchatcharone, c’est un guébariste plein de vent »
Guermèches
Les cacahuètes vendues dans des
landaus reconvertis sur la Place saint
Augustin étaient entières avec leur coque ou grillées salées..C’était les
cacahuètes guermèches qui étaient aussi servies en kémia aux comptoirs des
cafés
Ex « Sur le comptoir
du « Yoyo Bar », y avait des guermèches, des loubias, des
pois-chiches au camoun, des escargots sauce piquante, des olives, des quatre-
saisons… »
Guid’ massin guid’:
Enorme. On dirait
aujourd’hui plus grand que grand
Ex « Il était grand, il était fort, il
était costaud, guid’ massin guid »
Guidèche : Toutes les transactions commerciales guelmoises
commençaient par « Guidèche » »
Combien ? »… Mais le prix donné n’était qu’une entrée en matière,
au demeurant sans grande importance,. car
ce prix était largement majoré dans l’attente d’un marchandage qui
l’amènerait à une offre équitable.
Ex : « Ya Madame ti achete mes
œufs ? – Guidèche ? - Pour toi, c’est douro les 5…- Ti es fou, tu me
prends pour un américain ? »
Guid’guid’ -
Avec une grande exactitude, tout
juste.
Ex « Tiens, Madame, un kilo
guid’guid… »- « Pourquoi aujourd ‘hui , tu fais pas bon
poids ? »
Guitche : strabisme
Ex : « Il était complètement
guitche. Il avait un œil qui regardait la queue de la poêle et l’autre qui
regardait à la queue du chat »
H
Haricots de mer C’était les tellines que les bônois ramassaient sur les
plages et venaient nous vendre, toujours à l’heure de la sieste, en criant « Les bons zharicots de mer
Ex : « Qu’est-ce que ti as fait à
manger ? – Moi, j’ai acheté des bons haricots de mer »
Huile (Mets
de l’huile) C’était une manière de demander l’apaisement
dans une histoire.
Ex : « Ce plein de vent, j’vais
lui casser la tête ! » « Allez, va, mets de
l’huile !
(
faire
de l’huile) – craindre, avoir peur
Ex : Quand il a vu le sanglier foncer
sur lui, il a fait de l’huile »